A la tête de sa jeune marque, Marie Ange & Flory , entreprise de création et de diffusion de vêtements adaptés aux personnes âgées dépendantes, Marie-Josée Diantété nous raconte son long parcours de femme et de créatrice d’entreprise.
Le textile, depuis toujours
« J’ai commencé ma formation par un bac professionnel de couturière au Lycée technique de Kinshasa, au Zaïre. J’ai ensuite suivi deux ans de formation à l’Institut Supérieur des Arts et métiers de la même ville pour devenir professeure de couture, profession que j’ai exercée durant une année avant de quitter le Zaïre (aujourd’hui République Démocratique du Congo) pour la Belgique. En Europe, j’ai exercé en tant que couturière durant quelques années avant de venir à Bordeaux.
Là, les métiers de la retouche et de la couture de proximité étaient en pleine déshérence. Pas d’emploi. J’ai alors exercé ce que l’on appelle des petits boulots avant de reprendre les choses en main et de rechercher une formation qualifiante à un nouveau métier. L’ANPE m’a alors orientée vers la profession d’aide à domicile dispensée par l’IRTS.
L’exercice de ce métier riche en expériences personnelles et la rencontre d’autres aides à domicile m’a amenée à créer en 2004 l’Association des Assistantes de Vie et d’Aides à Domicile de Gironde (AASVAD33), qui existe toujours aujourd’hui. Cette asso est avant tout un lieu d’échange, de partage d’expériences et de bonnes pratiques. C’est lors de réunions de l’association que s’est posée la question des conditions de vie des personnes dépendantes et des problèmes d’habillement que rencontraient ces personnes ainsi que leurs aidants.
Quelques temps plus tard, j’ai passé le concours d’aide soignante et, au terme d’une année de formation à Blaye, j’ai commencé à travailler en structures (un EPAHD NDLR.). Là, s’est de nouveau posé la question des problèmes spécifiques rencontrés par les patients et par leurs aidants. Au début, pour me dépanner ou dépanner mes collègues, je ramenais certains vêtements de patients à la maison et je les réparais ou les adaptais à des besoins spécifiques. Ce n’est qu’en 2013 que j’ai décidé de professionnaliser cette pratique pour diffuser mes savoirs-faire et mes techniques.
Créer sa boîte ? Pas si simple…
Toutefois, j’avoue qu’à ce moment là, je ne savais pas par où commencer. Quelle type d’entreprise créer, sous quel régime ? Les contraintes étaient telles qu’il m’a fallu de longs mois d’hésitation avant de franchir le pas et d’entamer des démarches pour créer ma propre entreprise. J’ai malgré tout profité de ce temps pour poser des idées, réaliser des prototypes reproductibles et commercialisables. C’est à ce moment que le projet s’est vraiment concrétisé. Je voulais produire des vêtements adaptés aux personnes dépendantes, qui soient pratiques et beaux. M’éloigner des couleurs tristes des tenues fournies par les établissements spécialisés, offrir de la couleur. C’est important, parce qu’en plus des aspects pratiques souvent ignorés, ces vêtements dégradent ceux qui les portent, par leur tristesse et leur banalité. Ils donnent aussi à leurs proches l’image d’une vieillesse triste et aliénée alors qu’il suffit de peu de choses, de la couleur, du soin dans le dessin et la réalisation, pour qu’un vêtement donne de la joie, autant à celle ou celui qui le porte qu’à ses visiteurs. En plus de la fabrication, je développe aussi une activité de retouche et de sur-mesure. Enfin, Marie Ange & Flory propose aussi une prestation de conseil aux proches des personnes dépendantes afin de les aider à constituer un trousseau d’entrée en institution. Je vais également proposer un kit d’entrée en maison de retraite qui proposera les éléments essentiels du trousseau. A charge aux familles de le compléter selon leurs goûts ou leurs moyens.
On se lance !
A la fin de l’année 2015, j’ai commencé à me renseigner très concrètement sur la création d’entreprise. J’ai d’abord rencontré une personne du CIDFF qui m’a orientée vers la création d’une micro-entreprise. Cette création m’a permis de bénéficier d’une formation à la CCI de Bordeaux à l’issue de quoi j’ai créé Marie Ange et Flory, ma marque, et développé mes prestations de services. J’ai ensuite déposé mes concepts à l’INPI, suivant ici les conseils des formateurs de la Chambre de Commerce. Mais j’avais peur d’être débordée, menant de front la création de ma structure et mon activité d’aide soignante. C’est à ce moment que dans Tempo, le magazine municipal de Cenon , j’ai lu un article sur le Social/LAB/ Rive Droite . J’ai donc pris contact avec Ebène Hamès, la chef de projet CitésLab qui anime le Social/LAB/. Même si j’étais soutenue par mon compagnon et ma famille, qui étaient très enthousiastes à l’idée de me voir créer ma boîte, je me sentais très seule face à la complexité des démarches à mener pour construire une entreprise viable. Entre les démarches administratives, les obligations sociales et fiscales et les étapes nécessaires pour assurer la viabilité du projet, je me sentais très seule. Ebène m’a aidée à construire un business plan, m’a présentée à Hauts de Garonne Développement où j’ai pu bénéficier d’un accompagnement technique. Elle m’a également permis de rencontrer les déléguées de l’association EGEE, d’anciens cadres de grandes entreprises qui aident les créateurs d’activité. Elle m’a également permis de créer un début de réseau de chefs d’entreprises, de comptables, de juristes et de communicants. J’ai aussi pris conscience que je possédais moi-même un réseau professionnel : des cadres hospitaliers, des médecins, des collègues soignants qui pouvaient être prescripteurs auprès des patients et de leur famille… Ca m’a aidée à prendre de la confiance.
Un coup de main du Social/LAB/
C’est important pour moi qu’Ebène soit là. Elle m’accompagne presque depuis le début. En plus de ses compétences techniques qui m’aident à débrouiller certains problèmes, elle garde un regard sur le projet et sur sa cohérence que n’ont pas les autres intervenants qui ne me connaissent pas ou peu et découvrent souvent mon entreprise lors de notre rencontre. Elle m’aide à garder une perspective.
Ma famille est là, également, qui prend en charge certains aspects ou tâches. La communication, par exemple, ou la logistique du quotidien… Ca m’aide beaucoup, en plus du soutien moral que m’apporte leur présence à mes côtés.
Maintenant que l’entreprise est créée, il faut la développer. Je voudrais, dans les prochains mois, lancer une production semi industrielle, constituer un catalogue, monter le site web de Marie Ange & Flory. Pour cela, il va falloir que je m’y consacre à plein temps et, peut-être, que j’embauche une ou un commercial(e). C’est un pas difficile à franchir, mais je suis tenace et j’y crois.
Je vais encore profiter du réseau du Social/LAB/. A son lancement, Marie Ange & Flory disposera d’un local dans le futur Centre d’Affaires de Quartier de Carriet, à Lormont. Je suis aussi impliquée dans le projet d’activité textile porté par le Social/LAB/ et ATIS. Tout ceci m’aide à constituer mon réseau et à rester en prise avec les évolutions du marché et de la société dans son ensemble.
L’avenir
J’ai du courage, j’ai de l’ambition et je crois vraiment dans ce projet. L’apport essentiel des structures d’accompagnement a été de m’aider ponctuellement à lever certains freins, techniques ou administratifs. Ebène (et le Social/LAB/) m’accompagne au long cours et proposent souvent des solutions aux nombreux problèmes qui se posent. Ou bien elle ouvre des pistes. C’est un peu comme ça qu’est venue l’idée d’ajouter une autre corde à l’arc de Marie Ange & Flory, une activité de revalorisation de vieux vêtements qui pourraient offrir des solutions adaptées et à bas coût à des personnes modestes ou à des structures d’accueil à vocation sociale. C’est l’âme du projet, répondre à des vrais besoins.
Pour poursuivre cette phase de développement, je vais bientôt intégrer l’incubateur Les Premières Nouvelle Aquitaine , et ce sera toujours sur la Rive Droite, à Darwin ! »